Le zellige, cette technique décorative de mosaïque en terre cuite émaillée, est une des plus anciennes traditions artistiques du monde arabe. Originaire du Maroc, cette technique s'est rapidement répandue à travers tout le monde arabo-musulman et a évolué au fil des siècles. L'origine du zellige remonte au 10ème siècle, à l'époque de la dynastie berbère des Zénètes, qui ont introduit cette technique de mosaïque dans la région de Fès, au nord du Maroc. Les Zénètes utilisaient le zellige pour décorer leurs palais et leurs mosquées, et cette technique s'est rapidement répandue à travers tout le Maroc et dans les pays voisins. Au fil des siècles, le zellige a évolué pour devenir un art décoratif sophistiqué et hautement stylisé. Les artisans ont perfectionné les techniques de fabrication, en utilisant des matériaux plus raffinés et en créant des motifs plus complexes et plus élaborés. Au Maroc, le zellige est devenu une partie intégrante de l'architecture islamique, utilisé pour décorer les murs, les plafonds, les fontaines et les bassins dans les palais, les jardins et les mosquées. Les motifs traditionnels du zellige étaient souvent basés sur des formes géométriques et des arabesques, mais les artisans ont également incorporé des motifs floraux, des animaux et des inscriptions calligraphiques dans leurs créations.
Xème siècle: Les origines du zellige
Le zellige, technique décorative utilisant des carreaux de céramique, est originaire du Maroc où il a vu le jour au 10ème siècle, probablement dans la ville de Fès au Maroc. À cette époque, la céramique était déjà très présente dans l'art islamique, mais le zellige a apporté une innovation majeure : la possibilité de créer des motifs géométriques très complexes en assemblant des carreaux de formes et de couleurs différentes.
Les premiers zelliges étaient plutôt simples et se composaient de petites pièces carrées de céramique de couleur blanche ou beige. Ces carreaux de forme classique étaient coupés en forme de petits cubes appelés "zelliges" et étaient assemblés pour former des motifs géométriques simples. Les zelliges étaient fabriqués à la main et cuits dans des fours à bois, ce qui leur donnait une couleur rougeâtre caractéristique.
XIVème siècle: Perfectionnement de la technique du zellige
Au 14ème siècle, le zellige a connu un développement remarquable sous la dynastie des Mérinides au Maroc. Les artisans ont perfectionné la technique en utilisant des couleurs plus variées, en créant des motifs de plus en plus complexes, et en utilisant des formes différentes comme les hexagones, les étoiles et les losanges. C'est à cette époque que fût découverte la technique de la double cuisson des carreaux d’argile ainsi que l’usage des émaux polychromes. Le zellige est devenu ainsi un élément de décoration très prisé pour les palais, les mosquées et les mausolées, lui donnant une place importante dans l'architecture islamique.
Les Mérinides ont également élevé le zellige à un niveau d'art en le considérant comme une expression de leur identité culturelle. Les carreaux étaient faits à la main par des artisans expérimentés, qui savaient comment mélanger les couleurs et les textures pour créer des motifs complexes et harmonieux. Les Mérinides ont également introduit de nouvelles techniques, comme la découpe des zelliges en formes plus complexes, qui ont permis de créer des motifs plus élaborés.
Les motifs les plus couramment utilisés à cette époque étaient les étoiles, les fleurs et les motifs géométriques complexes. Les couleurs utilisées allaient du blanc, noir et vert au jaune, rouge et bleu, créant ainsi une palette de couleurs vibrantes et variées. Les zelliges étaient utilisés pour orner les murs, les sols, les fontaines et les bassins.
XVIème siècle: L'apogée du zellige
Au 16ème siècle, le zellige a connu son apogée sous la dynastie des Saadiens au Maroc. Les Saadiens ont été connus pour leur amour de l'art et de l'architecture, et leur utilisation du zellige dans la décoration des tombeaux des souverains et des édifices religieux a été particulièrement remarquable.
Les tombeaux des souverains Saadiens ont été ornés de zelliges complexes et colorés, créant ainsi des motifs géométriques impressionnants. Le tombeau de la dynastie Saadienne à Marrakech, qui abrite les restes de plusieurs membres de la dynastie, est un exemple célèbre de l'utilisation du zellige dans la décoration funéraire.
Le zellige a également été utilisé pour orner les murs et les sols des édifices religieux, créant ainsi des motifs qui reflétaient la perfection divine. Les mosquées, les madrasas et les zaouïas ont été décorées avec des zelliges complexes et colorés, créant ainsi une atmosphère de paix et de sérénité propice à la méditation.
Les Saadiens ont également introduit de nouvelles techniques pour la fabrication des zelliges, comme l'utilisation de moules en bois pour créer des motifs complexes en série. Cela a permis une production plus rapide et plus efficace de zelliges, qui ont été utilisés dans la construction de nombreux édifices, notamment des palais et des fortifications.
Les couleurs utilisées pour les zelliges au 16ème siècle étaient plus variées que jamais. Les couleurs chaudes comme le rouge, le jaune et l'orange étaient particulièrement populaires, ainsi que les couleurs plus froides comme le bleu, le vert et le blanc. Les motifs géométriques étaient toujours très populaires, mais les zelliges étaient également décorés de motifs floraux et de calligraphie.
Le 16ème siècle a été une période de grande créativité et de raffinement pour le zellige. Sous la dynastie des Saadiens, le zellige a été utilisé de manière prolifique dans la décoration des tombeaux des souverains et des édifices religieux, reflétant ainsi l'importance de la religion et de la culture dans la société marocaine de l'époque. Les techniques de fabrication ont été perfectionnées pour créer des motifs encore plus complexes, et les couleurs utilisées ont été plus variées que jamais. Le zellige est devenu un élément clé de l'art et de l'architecture marocains, et son influence peut encore être vue dans le paysage urbain marocain d'aujourd'hui.
XVII et XVIIIème siècles : période de déclin du zellige
Au 17ème et 18ème siècles, le zellige a connu une période de déclin sous la dynastie des Alaouites. Cependant, malgré ce déclin, le zellige a continué d'être utilisé dans la décoration de certains bâtiments. L'une des raisons de ce déclin est l'arrivée de la domination coloniale européenne sur le Maroc, qui a entraîné une interruption de la production de zellige. De plus, l'utilisation croissante d'autres matériaux de construction, tels que le béton, a réduit la demande pour le zellige. Cependant, malgré cette période difficile, le zellige a continué d'être utilisé dans la décoration de certains bâtiments, notamment les palais et les mosquées. Les Alaouites ont continué à utiliser le zellige dans les bâtiments officiels, tels que le palais royal à Meknès, qui a été décoré avec des zelliges complexes et colorés.
Les motifs géométriques sont restés populaires, mais de nouveaux motifs sont également apparus, tels que des motifs floraux et des représentations de scènes de la vie quotidienne. De plus, l'utilisation de couleurs plus sobres, telles que le noir et le blanc, a également été introduite. Au 18ème siècle, le zellige a connu une résurgence d'intérêt en raison de l'influence de l'architecture ottomane et andalouse. Cette influence s'est reflétée dans les motifs utilisés pour le zellige, qui ont commencé à incorporer des motifs plus organiques et des couleurs plus vives.
XXème siècle : redécouverte et promotion du zellige par les artistes et les designers
Au cours du 20ème siècle, le zellige a connu une redécouverte et une promotion par les artistes et les designers marocains, ainsi que par des architectes et des designers du monde entier. Cette période a également vu une utilisation accrue du zellige dans des projets de restauration de bâtiments historiques et dans des projets architecturaux modernes.
Dans les années 1920 et 1930, des artistes marocains tels que Mohamed Melehi et Mohammed Chabâa ont commencé à incorporer le zellige dans leurs œuvres d'art modernes, ce qui a contribué à renouveler l'intérêt pour cette technique décorative traditionnelle.
Dans les années 1960 et 1970, l'architecte français Jean-François Zevaco a utilisé le zellige dans la restauration de la médina de Rabat, la capitale du Maroc, et de nombreux autres bâtiments historiques à travers le pays. Cette utilisation a contribué à sauvegarder le patrimoine architectural marocain et à réaffirmer l'importance du zellige dans la culture et l'histoire du pays.
Depuis lors, le zellige a été utilisé dans de nombreux projets architecturaux modernes au Maroc et dans le monde entier. Des architectes tels que Zaha Hadid, Norman Foster et Jean Nouvel ont utilisé le zellige dans la conception de bâtiments contemporains, tels que le Musée Yves Saint Laurent à Marrakech et la Philharmonie de Paris.
Le zellige est également de plus en plus utilisé dans la décoration intérieure, en particulier dans les espaces de vie modernes et minimalistes. Les motifs traditionnels sont souvent réinterprétés pour s'adapter à des styles plus contemporains, tandis que les couleurs sont souvent plus vives et plus audacieuses que dans le passé.
Le 20ème siècle a vu une redécouverte et une promotion du zellige par les artistes, les designers et les architectes, ainsi qu'une utilisation accrue de cette technique décorative dans des projets de restauration de bâtiments historiques et dans des projets architecturaux modernes. Aujourd'hui, le zellige continue d'être un élément clé de l'art et de l'architecture marocains, ainsi qu'un exemple de l'importance de la préservation et de la réinterprétation des traditions culturelles pour les générations futures.
Depuis sa création au 10ème siècle, le zellige a traversé le temps. Au fil des siècles, il a évolué avec la découverte de nouvelles techniques de fabrication, de nouveaux motifs, mais également de nouvelles couleurs. Il a connu des périodes d'ascension et des période de déclin, mais a toujours su se renouveler et se réinventer pour ne jamais disparaitre. Le zellige est aujourd'hui un savoir faire ancestral qui préserve les techniques de fabrication initiées il y a plusieurs siècle. C'est à travers son histoire, ses motifs, ses nuances et ses textures que les designers et architectes du 21ème siècle puisent leurs inspirations afin de développer cet art millénaire tout en préservant son histoire et ses origines.
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